samedi 19 octobre 2013


Me caser, moi ?
La bimbo, qui occupe 79% de mon cerveau, s'étire sur sa chaise longue et me nargue par au-dessus ses lunettes noires à la Jackie O: Me caser maintenant ? Hors de question. J'ai encore tellement d'erreurs à faire : Vivre une relation secrète avec le père d'une de mes amies, se faire prendre et me faire bannir à vie du groupe Les anciens de l'Ihecs, pour garder le contact. Vivre 15 mois à Tokyo avec un homme, au regard et aux cheveux noirs, qui n'a pas le droit de me dire son vrai nom ni ce qu'il fait pour gagner sa vie. Le quitter pour Pablo, un scénariste new-yorkais, super tourmenté, qui fera de moi sa muse et la seule actrice du seul court-métrage qu'il n'aura jamais réalisé. J'y jouerai une jeune femme, fille d'un ex-dictateur africain, super riche et bipolaire qui finit par avaler toute la bouteille de son Chanel N°5. Je me noierai dans le rôle, deviendrai dépressive, perdrai 10 kilos. Pour les reprendre avec Caleb, un peintre brésilien qui n'arrive à dessiner que sur la plage, lors du coucher de soleil. Pendant plus de 3 ans, on aura des conversations interminables sur la vie en communauté des fourmis et le mal-être des dauphins. Un matin, sur un coup de tête, je partirai pour l'Inde, vivre pendant 3 mois dans un ashram, pour y faire voeu de silence. Je tomberai éperdument amoureuse d'un moine bouddhiste, dont j'ignorerai à jamais le nom (à cause du voeu de silence) et je pleurerai toutes les larmes de mon corps, sur ma natte de bambou. Bouleversée, je rentre à Paris, j'écris un livre et je me marie avec Henrick, mon éditeur, un immense viking suédois.
"Me caser maintenant, pour quoi faire ?" me dit-elle en se recouchant.

Et elle me laisse seule avec l'angoissée, celle qui est accroupie dans un coin de la cuisine, la tête entre les mains, entrain de faire des calculs :
J'ai 23 ans et j'aimerais vraiment avoir mon premier enfant avant 30 ans, sinon je serai une maman hors du coup. Je veux profiter, au moins, trois ans de mon mari, partir en vacances à l'improviste, buller à la campagne, se disputer pour savoir si la couleur de la buanderie sera plutôt ocre ou plutôt nacrée. Et je ne peux pas me marier après 1an de vie commune, c'est trop court pour découvrir toutes les petites manies de l'être aimé, celles qui risquent de nous faire péter un plomb et de divorcer un chaud après-midi d'été. Ce qui fait 2 ans de vie commune, 3 mois pour persuader ma mère qu'il n'est pas un fainéant à tendance suicidaire et sadomasochiste, 3 mois de fiançailles, 3 mois de lune de miel et de recherches d'appartements à San Francisco, plus 3 ans de vie seul à seul, dans notre super hangar transformé en loft contemporain avec une touche de vintage, et un immense aquarium pour notre poisson nommé wanda, plus 3 mois d'hésitation et 9 mois de gestation. Ce qui me donne 29 ans et 9 mois, lors de l'accouchement de nos premiers jumeaux.
Tout ça veut dire que, si je veux respecter mon timing, je dois trouver mon futur mari ce soir ou demain matin au plus tard.

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